De l’expert au bâtisseur : l’étape que beaucoup n’osent pas franchir

Aujourd’hui, de nombreux jeunes Africains brillants, accumulent des compétences techniques, stratégiques et créatives. Ils se forment dans des domaines pointus, acquièrent de l’expérience sur le terrain et deviennent de véritables experts. Pourtant, un constat s’impose : au lieu d’utiliser pleinement leur savoir-faire pour bâtir et faire prospérer des entreprises solides, beaucoup préfèrent vendre leurs compétences sous forme de prestations de services.

Cette tendance, bien qu’elle permette de générer des revenus rapides, limite considérablement la création de structures pérennes et freine l’accumulation de valeur ajoutée au sein de nos économies locales.

Pourquoi cette situation persiste-t-elle ?

Plusieurs facteurs expliquent ce phénomène :

La recherche de revenus immédiats : Créer une entreprise structurée demande du temps, des investissements et souvent beaucoup de patience avant de voir des résultats. Face à des réalités économiques difficiles, il est compréhensible que de nombreux jeunes entrepreneurs choisissent la voie la plus rapide pour monétiser leur expertise.

Manque de soutien financier et institutionnel : Les structures d’accompagnement (incubateurs, banques, fonds d’investissement) sont encore insuffisantes ou difficiles d’accès pour la majorité. Beaucoup de talents se retrouvent seuls pour porter leurs projets.

Peu de culture d’entreprise : Dans de nombreux pays africains, l’éducation entrepreneuriale se limite encore trop souvent à l’idée de « se débrouiller » plutôt qu’à celle de construire une organisation capable de durer et de se développer au-delà du fondateur.

La peur de l’échec : Monter une entreprise formelle comporte des risques élevés. Vendre ses services personnels semble souvent plus rassurant que d’investir dans une aventure qui pourrait échouer.

Alors, quels conséquences pour nos économies ?

À long terme, ce choix de rentabiliser ses compétences de manière individuelle a plusieurs effets négatifs :

  • Moins de création d’emplois : Une entreprise bien structurée embauche, forme et multiplie les compétences. Un prestataire indépendant, lui, travaille souvent seul.
  • Faible accumulation de capital : La richesse générée par un prestataire est beaucoup plus limitée que celle qu’une entreprise performante pourrait produire et réinvestir.
  • Fuite du savoir-faire : Dans certains cas, les meilleurs talents finissent par exporter leur expertise à l’étranger, aggravant ainsi la fuite des cerveaux.
  • Développement économique ralenti : Sans entreprises solides pour porter l’innovation, produire localement et conquérir des marchés, le tissu économique de nos pays reste fragile et dépendant.

Comment donc inverser la tendance ?

Pour passer du mode « prestataire » à celui de « bâtisseur d’entreprise », plusieurs leviers doivent être activés :

  • Changer de mentalité : Il est crucial de voir son expertise non pas seulement comme un moyen de survie immédiate, mais comme une fondation sur laquelle construire quelque chose de grand et durable.
  • S’entourer : Bâtir une entreprise ne se fait pas seul. Il faut s’associer à d’autres compétences (gestion, finance, marketing) pour créer une structure cohérente.
  • Accepter de grandir progressivement : Vouloir tout avoir tout de suite est un piège. Une entreprise solide se construit étape par étape, avec patience et vision.
  • Se former à l’entrepreneuriat : Comprendre les bases du management, de la stratégie et de la finance est aussi important que de maîtriser son métier.
  • Rechercher des financements intelligemment : Même s’ils sont parfois difficiles d’accès, il existe des programmes africains et internationaux qui soutiennent les jeunes entrepreneurs. Persévérance et réseautage sont essentiels.


L’Afrique regorge de talents. Mais tant que nous continuerons à vendre uniquement nos compétences individuelles plutôt que de bâtir des entreprises, nous limiterons notre propre impact et celui de nos pays. L’heure est venue de changer de cap : utilisons nos savoir-faire non pas seulement pour « obtenir un emploi, mais pour construire.

Rédaction : Regional

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